Anciennes : Mercedes-Benz 200-300
(W124) L’ancêtre de la Classe E fête ses vingt ans Apparue en 1984, la W124 a confirmé par son succès et ses innovations techniques combien la "gamme moyenne" est au cœur de la tradition Mercedes. C’est également elle qui a renoué avec la tradition du cabriolet à quatre places Les gens de Stuttgart ont forgé une expression pour désigner ce segment de marché si capital pour eux depuis les années cinquante : Mittleren Mercedes-Klasse. Soit la "classe du milieu", sorte de juste milieu automobile dont la vocation est de satisfaire la clientèle la plus vaste et la plus exigeante. Une notion dont Hotchkiss s'était fait le champion en France avant-guerre. Aujourd'hui, la "classe moyenne" est incarnée chez Mercedes par la "Classe E", héritière de la série 200-300 lancée il y a vingt ans, en 1984, et remplacée en 1995. Désignation du type usine : W124. Cette famille de berline, limousine, break, coupé et cabriolet est celle qui inaugura chez Mercedes le système de désignation des modèles encore en usage aujourd'hui. Il consiste à faire précéder la mention chiffrée de la cylindrée par la ou les lettres hiérarchisantes au sein de la gamme. Une Classe A est ainsi logiquement plus modeste qu'une C ou qu'une E. En 1993, lorsque fut adoptée cette nouvelle nomenclature, quelques amateurs s'étonnèrent de voir la W124 baptisée de ce "E" énigmatique, plutôt que du "M" correspondant à Mittelklasse. Cette logique fut respectée pour sa grande sœur, la limousine de la série S, baptisée ainsi parce qu'elle est d'une "classe spéciale" (Sonderklasse). Toutefois, ce changement de nom n'est pas le seul fait marquant de la carrière de la W124. Laquelle assura l'essentiel des ventes de la marque onze années durant. Sur le plan du style, la 200-300 choqua quelques clients conservateurs. Son profil en coin avec malle haute et sa robe dépourvue de tout chrome —hormis la calandre et les Etoiles à trois branches— confirmait la direction prise par la petite berline 190 présentée fin 1982. Elle poussait même l'exercice encore plus loin en osant incliner davantage son pare-brise, ses phares et sa calandre dans le souci de réduire la traînée aérodynamique et la consommation. Un cahier des charges strict mena les ingénieurs et les stylistes à signer de nombreuses innovations. Parmi lesquelles un nouveau type de joints de portière, dont tous les constructeurs s'inspirèrent à la fin des années 1980. Ou bien encore des boucliers avec déflecteurs intégrés fabriqués, comme les enjoliveurs de roues lisses, dans un vulgaire plastique. Comble de l'horreur aux yeux des nostalgiques des Mercedes étincelantes d'antan ! Résultat de cette quête d'allègement et d'optimisation du rendement, la W124 se montra plus légère, plus performante et plus habitable que son aînée W123 lancée en 1976. Son coefficient de pénétration dans l'air de 0.30 (équivalent à celui qu'atteignait une Citroën GS en 1970) démontrait de manière éclatante que les règles de l'aérodynamique pouvaient parfaitement s'accommoder de la présence d'une calandre traditionnelle et d'une mascotte en bout de capot. Cette performance remarquable frappa les esprits à une époque où les publicistes étaient fascinés par l'aérodynamique, discipline mystérieuse mais ô combien poétique ! Elle fut par ailleurs une leçon dont se souvinrent Lancia et Rover lorsqu'ils renouèrent par la suite avec ce type d'accessoire, expression de leur identité stylistique. Techniquement, la W124 s'inspira fortement de la W201 lancée une année auparavant. La suspension multibras de la petite 190 servit de base pour l'épure de son train arrière (une architecture en passe aujourd'hui de devenir la norme). Quant à son train avant, il se caractérisait par l'inclinaison du pivot (reconnaissable à l'angle particulier que prenaient les roues lorsque braquées à fond) et son système anti-plongée. La série 200-300 / W124 eut l'honneur d'inaugurer de nombreuses innovations techniques qui trouvèrent leur chemin vers les autres modèles de la gamme et, parfois, jusque chez la concurrence. On notera par exemple le pont autobloquant ASD (automatique locking différentiel), l'anti-patinage électronique ASR (accélération skid control), la transmission intégrale avec pont avant enclenchable automatiquement (4MATIC), ou encore la boîte automatique à cinq rapports. Si le pot catalytique n'était au début qu'une option, il fut vite offert de série dès la seconde année de production en Allemagne. Même cheminement pour l'ABS qui ne fut intégré à la dotation de série qu'en 1988. Quant au coussin de sécurité côté passager disponible dès septembre 1988, cela fait maintenant dix ans que toutes les Classe E en bénéficient d'office. Si la W124 est aujourd'hui de taille à se réclamer du titre de la Mercedes la plus fiable de l'époque moderne (si l'on veut bien faire exception des séries S, trop élitistes), c'est bien grâce à sa fabuleuse famille de moteurs essence et Diesel. Une gamme couronnée en octobre 1990 par la déjà légendaire 500 E dotée d'un V8 de 326 chevaux (la première Mittelklasse à huit cylindres). Elle fut complétée sur le marché allemand par une 400 E de 279 ch en septembre 1992. La déclinaison de la gamme suivit
dans un premier temps le scénario mis en place par l'aïeule W123. La
berline 200-300 se vit ainsi très vite secondée par un break (1985),
puis par une variante coupé (1987) tout aussi novateurs et modernes
sur le plan du style. Enfin en 1991, après être demeuré
absent de ce segment une vingtaine d'années, Mercedes-Benz dévoila
une variante découvrable à quatre places. Les progrès de la
conception par ordinateur permettaient alors de mieux maîtriser les
problèmes de rigidité torsionnelle, et de combiner sécurité et masse
contenue. Un total de 2.058.777 berlines fut
produit entre 1984 et 1995, auquel s'ajoutent 340.503 breaks. La
W124 fut la première série à offrir une telle combinaison entre
succès et déclinaisons de carrosseries. Une recette que fait évoluer
de belle manière sa descendante, la Classe E de 2004 : elle se
dédouble en une superbe Classe CLS, aux côtés des CLK coupé et
cabriolet devenus incontournables sur leur segment.
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